Discours Introductif, Sommet Afrique-France, Montpellier, le 8 octobre, 2021.
M. le président de la République française, distingués invités, mes chers collègues et participants, bonjour.
Je suis Ateki Seta du Cameroun, et c’est un honneur pour moi de prendre la parole devant vous, ici en ce moment très spécial. Jamais autant de jeunes venant de tous les coins du continent, n’ont eu cette opportunité de rencontre pour entreprendre une si grande mission de redéfinition, de et de réinvention de notre relation Afrique France. Cette opportunité unique, elle est vraie pour nous les 11 représentants présents avec vous aujourd’hui. Nous nous sommes rencontrés il y a quelques jours seulement et nous avons accepté de relever le défi de représenter les 5000 personnes qui ont participé aux consultations qui ont alimenté le rapport remis par Achille.
Nous sommes de la société civile, des pays africains et de la diaspora, avec des expériences de vie différentes mais un objectif commun. Ecrire non pas seulement une nouvelle page, mais tout un nouveau récit. En réalité, nous ne sommes qu’un échantillon de millions de jeunes Africains et issus de la diaspora, engagés pour le changement. Engagés pour changer les relations entre l’Afrique et la France.
Nous sommes ici pour dire avec honnêteté ce qu’elles ont été, ce qu’elles sont et ce que nous souhaitons qu’elles deviennent. Souhaiter n’est pas le bon verbe. Ces relations DOIVENT changer.
Nous n’avons pas le choix. La relation est abimée, le lien est distendu, les mains s’éloignent et l’espoir de faire communauté ne nous habite plus.
Mr. le Président, vous nous avez demandé de penser cette relation en 2030. D’imaginer notre futur souhaitable. L’exercice n’est pas simple. Il s’agit de construire librement une vision. De mettre en place une feuille de route pour qu’elle devienne réalité. 2030, est loin mais c’est demain. Nous ne devons pas, vous ne pouvez pas, attendre encore dix ans pour agir.
Mais pourquoi ? Pourquoi un futur souhaitable de cette relation ? Faudrait-il vraiment le penser ensemble ? Quid d’un divorce – d’une rupture totale de la relation ?
No ! Parce qu’une rupture est un acte destructeur qui s’inscrit dans la tradition des violences et des tensions qui caractérisent une part de notre passé. Notre avenir doit se construire dans un dialogue sincère pour donner une chance à notre communauté de destins.
Parce qu’on ne peut pas se le permettre : face à des problèmes qui se globalisent, il faut s’unir. Parce que nous ne pouvons pas habiter seuls dans un monde complexe : crises climatiques, écologiques, sanitaires, migratoires, sécuritaires. C’est ensemble, et seulement ensemble que nous parviendrons à relever ces défis communs, à produire de véritables solutions innovantes et partagées.
And lastly, because you have called upon us, a generation that is not hampered by the burdens of nostalgia, we want to look at Africa-France relations with fresh eyes, with optimism and
confidence. To paraphrase Nelson Mandela who embodied , our choices must reflect our hopes and not our fears. We are not afraid to take responsibility. You must find the courage to take yours, because France cannot remain trapped in an outdated vision of the African continent. We have come to propose solutions and to dialogue with you because we have a different, more admirable future to offer you. In order to do so, there are some truths that need to be told. That’s why I invite Adelle, to take the stage.
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Bonjour, je m’appelle Adelle Onyango et je viens du Kenya – et bonjour l’afrique francophone
The current relationship between Africa & France is complicated
and in order to build one that helps us solve global problems, it is important for us to interrogate this current complicated relationship and ask ourselves,
what is not efficient,
what is not ethical,
and where do we see integrity gaps.
To do this, we need to be brutally honest.
The history of colonization is understandably very important. For Africa it is a past that is as painful as it is destructive.
And the effects can still be felt to date, economically but also on an interpersonal level. We feel the pain ever day.
The lack of a clear, strong acknowledgment of the continent’s pain on the destruction experienced results in skepticism.
The absence of actions that would uplift that acknowledgement is also a major issue in this current France – Africa relationship.
In fact the air of denial that France chooses to sit in, is uncomfortable for both sides but does none of us any good.
How can you trust the source of your pain without them clearly acknowledged?
What we end up with is Skepticism on what exactly does France stand for. And so we ask you Mr president, how strong, can a relationship built on pain, skepticism and lack of trust, really be.
We, not just as a team, but all 5000 of us, need a commitment from you, that you will join us in the eradication of the “France-Afrique”, this very unfair dominance has to end.
Furthermore, the breakdown in understanding what France fully stands for is fueled by the continued collaborations with agencies, leaders or individuals who have glaring integrity issues whilst on the other hand claiming to be standing for human rights.
On one hand France is entrenched in issues around racism, exploitive dominance whilst claiming to teach others about democracy. These are two profiles that one cannot fill at the same time. And really it’s rather arrogant to do this
What it creates is this cognitive dissonance which is a discomfort because of these two conflicting values. It not only doesn’t make sense, it is also unsustainable and births a negative perception and ambiguity in knowing once again, what values does France stand for.
It is very clear that the current relationship is imbalanced, not collaborative and in some instances exploitative.
We have social impact solutions built without input of respective African civil society who are a resource when it comes to understanding problems & creating solutions that translate efficiently on ground and could even be adopted by France.
Let’s not forget that whilst we want to repair and change the relationship, there are some who are benefiting from this current dysfunctional system.
Be it private industries from France on the continent with non-ethical practices, or corrupt individuals and groups from both France & Africa. This and the lack of a very loud and public condemning of this, obviously fuels skepticism
This honest interrogation is an important first step as the strengths and weaknesses of the current relationship will dictate the success or failure of our collective future relationships.
But we are not only telling you what’s not working, we are solution driven, we know what you need to commit to today and have a clear path that my colleague Arthur will share with you.
Arthur, c’est a toi ——
Monsieur le président, Mesdames et Monsieur, Un futur souhaitable de la relation est possible… imaginons un instant que nous sommes en 2030.
En 2030, la France a assumé son histoire dans la relation Afrique France :
Dés 2023, la France est enfin sortie du déni, elle a reconnu sa responsabilité sans tomber dans le piège de la recherche de pureté. Le travail de mémoire de l’esclavage et du colonialisme est enfin permis.
Les œuvres restituées, sans argument normatif de conservation du patrimoine public participent de cette réparation … elles nous nourrissent de nouveau, elles circulent dans et hors de nos musées, des musées vivants. Cette reconnaissance permet ainsi de créer les conditions d’une collaboration apaisée et constructive entre nos peuples et nos jeunesses.
A la fin de cette décennie, la relation est équilibrée, car les imaginaires ont évolué, entrainant de vrais changements relationnels. Ils ont d’abord évolué avec le vocabulaire. L’attention toute particulière portée par la France aux éléments de langage et à la posture pour sortir du rabaissement conscient ou inconscient ont permis en dix ans de changer les mots et les actes de la relation. On ne parle plus d’aide ou de développement, mais de partenariat et de co-construction. Ce changement de paradigmes entraine avec lui les institutions chargées de notre partenariat, elles ont changé de dénomination pour épouser l’ère du temps, l’ère de notre temps, l’ère d’une relation d’égal à égal.
A cette date, la relation est vivante parce qu’elle est portée par des nombreux acteurs : bien sûr que la France a encore un réseau de femmes et d’hommes qui assurent les relations diplomatiques avec les représentants officiels des nations et des institutions panafricaines, mais elle compte aussi sur d’autres acteurs en charge des questions de démocratie et de défense des droits humains. Les programmes partenariaux se font avec les parties civiles reconnues comme des interlocuteurs crédibles et légitimes. On est sortis du brouillage des pistes grâce à la mobilisation de parties civiles et de jeunes qui réfléchissent, ensemble, par- delà la méditerranée, à leur interdépendance dans une relation qui vit. Le rapport du Pr Achille M’bembe nous propose un fonds de la démocratie, il sera être orienté vers cette société civile, qui doit être reconnue officiellement et y avoir une place de choix.
En 2030, notre relation est débarrassée des scories symboliques d’une époque de domination révolue : le Franc CFA et ses réserves associées sont un lointain souvenir puisque l’Afrique a désormais sa monnaie, une monnaie qu’elle gère en totale liberté, les bases militaires françaises sur le continent seront fermées et elles auront laissé la place à des armées autonomes, les interventions militaires décidées au gré des humeurs françaises pour soutenir des régimes amis font désormais place aux mécanismes de sécurité collective de l’Afrique.
En 2030, l’OPEN DATA imposée à tous les acteurs de la relation permettra un véritable FAIR PROCESS pour une totale transparence sur les flux humains, financiers et de ressources. Couplé à une communication sur le territoire français, cette approche permettra de réconcilier le peuple Français avec l’Afrique. Les diasporas, cette part africaine de la France, auront la capacité de diffuser cette approche sur un territoire maillé d’un réseau de maisons du génie Africain.
Cette dynamique induit des succès mais, il y aura encore des échecs et des programmes mal construits. Mais sur les échecs, la posture de la France aura changé – ils seront reconnus comme tels et permettront donc l’émergence de nouveaux projets, sans suspicion. Et ils seront plus souvent pensés avec les Africains, donc moins souvent à côté de la cible. Moins de
grands discours, plus d’attention aux besoins, à l’écoute, à l’objectivation des résultats qui entraine une coresponsabilité.
EN 2030, l’Afrique sera une source d’innovation et de solutions fondées sur la nature pour la France et le reste du Monde : les compétences endogènes seront remises au cœur des savoirs communs grâce à la circulation accrue des étudiants de part et d’autre de nos territoires, à l’équivalent du programme Erasmus Africain, des campus multidisciplinaires et multiculturels accueillant des étudiants d’Afrique et de France et des partenariats de recherche équilibrés favorisant la montée en puissance de centres de recherche sur le continent. L’Afrique doit inspirer la France. Aujourd’hui le continent africain a des pratiques numériques avancées qui pourrait inspirer votre pays. C’est une question de regard. Ceci fera de la relation Afrique France un terreau de solutions pour une meilleure gestion de la crise climatique, un emploi plus efficient du numérique et la construction d’un bien commun.
2030 c’est de la prospective à court terme. Le chemin est semé d’embuches mais c’est pour cela que nous allons le parcourir. Cette lecture prospective et le rapport du Pr Achille M’bembe doivent constituer la feuille de route de ce nouveau contrat que nous voulons établir avec vous. Monsieur le président, après votre écoute, je vous invite au dialogue. Pour construire ce 2030, nous devons créer les conditions d’un nouveau départ et engager une nouvelle relation Afrique France.
Monsieur le président, cessons les palabres, cessons les leçons de philosophie, soyons concrêt, prenons, dès à présent, des mesures qui marquent le tournant de cette relation Afrique France. Je propose à Eldaa de vous interpeller sur un premiers pas.